Au Québec, avec amour : Une aventure toute en saveurs de Londres à la Maison

Après s’être envolé pour le Royaume-Uni dans le but de travailler dans un pub, le chef Derek Dammann décide, au bout de deux jours seulement, de se rendre à Londres. Il ne l’a jamais regretté. Lorsqu’il s’arrête simplement pour manger un morceau au restaurant Fifteen de Jamie Oliver, il est embauché comme sous-chef. Pendant près de quatre ans, il gravit les échelons jusqu’au poste de chef de cuisine.

Le chef Dammann revient ensuite au Canada et ouvre la Maison Publique, un pub gastronomique à l’ambiance décontractée situé sur le Plateau-Mont-Royal, à Montréal. Depuis ce temps, la Maison Publique a permis au chef Dammann de gagner en reconnaissance et figure sur des listes prestigieuses telles que Eater, enRoute et Canada’s 100 Best.

Nous avons récemment parlé au chef Dammann pour savoir quelle influence son expérience outre-Atlantique avait eue sur le concept de la Maison Publique et en quoi les changements climatiques du Canada influencent le choix des ingrédients.

Fort d’une expérience en cuisine gastronomique anglaise et ayant travaillé pour Jamie Oliver au Royaume-Uni, qu’est-ce qui a inspiré le choix d’un pub gastronomique à l’ambiance plus décontractée pour la Maison Publique?

En fait, c’est la cuisine italienne qui représente la majeure partie de l’expérience que j’ai acquise en Angleterre. Jamie m’a également formé dans ce domaine, ce qui m’a donné l’occasion de travailler avec d’excellents fournisseurs et de profiter de voyages extraordinaires en Italie pour nous approvisionner.

Avant de déménager à Londres, j’ai travaillé chez Zambri’s à Victoria, en Colombie-Britannique, un excellent restaurant italien où j’ai vraiment appris à accorder la plus grande importance aux ingrédients. Cela dit, mon expérience au Royaume-Uni a été un tremplin pour ma carrière. Londres est une ville gastronomique incroyable et très riche sur les plans culturel et historique.

Lorsque j’ai ouvert la Maison Publique, je la voulais à l’image du restaurant où j’aimerais manger, en espérant que d’autres allaient partager ce sentiment. J’aime l’idée de manger dans un bar, alors j’ai misé sur ce point. Le restaurant est situé dans un quartier résidentiel à l’angle de deux rues magnifiques. L’été, j’aménage des jardins à l’extérieur et leur donne un aspect sauvage et luxuriant. En hiver, on peut regarder un match de hockey, ou les voitures avancer lentement dans la neige. Je voulais servir des mets et des vins canadiens afin de conférer simplicité et accessibilité au restaurant.

En quoi votre expérience et les techniques acquises outremer ont-elles influencé la préparation de vos mets?

Peu importe l’endroit où on travaille, on apprend et découvre de nouvelles techniques et idées en observant la manière dont le chef prépare les aliments. Voyager permet d’acquérir une expérience inestimable. Nul besoin d’être raffiné ou de fréquenter les meilleurs restaurants du monde, il suffit d’explorer et de goûter les petits plats et les spécialités des endroits qu’on visite. Lorsqu’on explore différentes cultures, de grandes idées peuvent naître à partir de choses simples, comme des collations! Les idées n’émanent toutefois pas toujours de la nourriture. Une immersion dans une culture nouvelle vous permettra de vous épanouir en tant que chef. Les voyages comportent leur lot d’aventures, cela fait partie du plaisir. Toutefois, au bout du compte, il faut bien s’arrêter pour manger quelque part!

Avez-vous modifié la façon dont vous utilisez les épices et les assaisonnements depuis l’ouverture de votre pub gastronomique à Montréal? Donnez-nous quelques exemples.

Après avoir passé de nombreuses années à voyager et à observer le Canada de l’extérieur, j’ai réalisé à quel point nous avons de la chance. Le Canada est si vaste et multiculturel que nous sommes en mesure de nous inspirer et de reproduire des saveurs de partout dans le monde. Le Canada est un pays relativement jeune, mais nous avons tous les outils nécessaires pour cuisiner comme les pays plus anciens, dont le patrimoine culinaire est d’une richesse exceptionnelle. Nous produisons localement, nous avons de superbes vignobles et nous exportons dans le monde entier d’énormes quantités de produits alimentaires provenant des régions côtières et des prairies.

Parmi les accords de saveurs figurant à votre menu, lesquels préférez-vous?

Lorsqu’il est question de profils de saveur, j’utilise souvent la même approche. Les rudiments sont évidemment importants : sucré, salé, amer, etc. Cependant, j’ajoute toujours du chili à mes recettes, non pas pour les rendre épicées, mais pour leur donner un petit quelque chose en plus. Selon moi, son arôme est souvent négligé et il permet vraiment d’équilibrer les saveurs d’un plat. Il en va de même pour les anchois. Je ne mentionne pas souvent cet ingrédient parce qu’il fait réagir certaines personnes avec dégoût vu sa réputation, mais il contribue énormément à l’assaisonnement des brassicacées ou des alliacées. On les perçoit à peine, mais ils possèdent également ce petit quelque chose en plus qui rehausse le goût. Ils sont délicieux avec l’agneau et le veau.

Tout peut arriver lorsqu’il est question de menus. En fin de compte, les mets doivent offrir les caractéristiques « Big Mac ». À part le fait qu’il est mauvais pour la santé, ce plat est parfaitement équilibré. Bien sûr, il a été créé par des scientifiques, mais son profil de saveur le rend irrésistible. C’est ce que je recherche avec mes plats : l’irrésistibilité. 

La Maison Publique sert non seulement des bières artisanales locales, mais se targue également d’utiliser des ingrédients locaux. Quelle est l’influence des changements de saisons et de conditions météorologiques du Canada sur vos menus?

Je tiens à m’approvisionner auprès de familles d’agriculteurs ou de pêcheurs écoresponsables. Ici, le sol est couvert de neige cinq mois par année. Je veux donc travailler avec des agriculteurs qui cultivent des légumes d’hiver, des pêcheurs qui ne peuvent pas prendre le large en raison du mauvais temps et des gens qui se lèvent pour aller nourrir leurs animaux. Il est très facile de décrocher le téléphone pour obtenir tout ce dont on a besoin. Il n’est toutefois pas évident d’avoir accès à plus de 40 fournisseurs à la fois.

Parmi les techniques de cuisson, créations de saveurs ou plats que vous aviez l’habitude d’utiliser au Royaume-Uni, qu’est-ce qui vous manque le plus?

Rien en particulier. J’ai passé d’excellents moments là-bas et je profite maintenant de mon retour au bercail. Si je devais choisir, précisons que j’ai élaboré les huîtres à la Marmite une fois revenu au Canada. Je suppose qu’il s’agit en quelque sorte d’un clin d’œil au Royaume-Uni.

Quels ingrédients seront à l’honneur à la Maison Publique cette année?

Nous servons beaucoup de légumes et au milieu de l’été, notre menu est semi-végétarien. Je n’aime pas suivre les tendances, elles vont et viennent. J’aime que notre menu reflète notre style. De nos jours, on peut pratiquement créer un concept de restaurant en moins de 10 minutes grâce aux médias sociaux. Mais sera-t-il toujours pertinent au bout de six mois? À la Maison Publique, nous cuisinons pour nos clients, car ce sont eux qui nous rendent visite tous les soirs. Je cherche avant tout à les rendre heureux. J’adore les huîtres, mais je n’en sers pas ici. Je les laisse aux experts.

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